A la veille de notre départ pour la vallée du galbe, confortablement installé autour d'une table garnie d'un délicieux boudin aux pommes, Patrice, la bouche pleine, lance l'idée de l'ascension du pic de st Barthélemy. Le Capcir est a plus de 3h00 de route et bien que la descente de la vallée du galbe soit très tentante, le St-Barthélemy nous semble être un meilleur choix. Modeste, il ne culmine qu’à 2400m, mais le point de vue sur les Pyrénées Ariègeoise est sans pareil. Il faut vite profiter de l'enneigement exceptionnel de cette année pour aller skier la face sud tant que cela est encore possible.
C'est le moment idéal car un redoux est prévu qui va rapidement déshabiller le St-Barthélemy.
A l'entrée de Luzenac, Patrice sort sa carte IGN, la neige est à 900m et il serait possible de partir depuis Axiat. 

On se gare sur un chemin à l'arrière de l'église. La neige est si abondante qu’il nous faut se faire une place à grands coups de pelles.

Le départ est enchanteur, le sentier semble avoir été modelé spécialement pour nous. Juste assez large pour nos spatules, sinueux, encaissé et bordés d’arbustes immaculés.

On part un peu à l’aventure car il est très rare de tracer à ces altitudes. Après plusieurs traversées de petits cours d’eau à travers bois, une difficulté de taille survient, un brusque ressaut barre notre route, plutôt court mais assez raide et avec une neige très instable, lourde et humide. Il n’y a pas d’autres alternatives, à moins de rebrousser chemin, que de tenter de passer … en force!

«Quand j'avance, je recule, comment veux-tu que …» J’ai laissé pas mal de jus dans cette épreuve et pas mal de temps s’est écoulé. Il est déjà près de midi et mes pieds souffrent le martyre. Ils font connaissance avec mes nouvelles chaussures, des Garmond Mega-ride, et Mega-douloureuses. Il est plus que temps de s’arrêter pour se remettre de ces péripéties. Comme par magie, un superbe promontoire se présente à nous, plat et spacieux, un endroit idéal pour une halte réparatrice.

Il est déjà 14h00, un rapide point sur la carte nous donne une indication sur notre position. Le bilan n’est pas fameux, seulement un tiers du parcours a été effectué. Patrice peu enclin à finir la randonnée à la lampe torche secoue soudain la nappe sans défaire la table. Le voilà parti, me laissant seul à bailler aux corneilles. Je range vite mes affaires afin de le rejoindre avant qu’il ne se perde.

La suite du parcours se fait à un train d’enfer, le sommet apparait rapidement au loin mais il semble s’éloigner à mesure que l’on évolue sur un terrain devenue plus aride et moins bucolique.

Arrivé au sommet je suis pris de soudaines et de multiples crampes aux épaules, aux mains et aux adducteurs. Les 1500 m de dénivelés ont eu raison de mon corps sous-entraîné. Heureusement Patrice m’aide à rechausser mes «Mythic light» flambant neufs, avant la fonte des neiges J … , car seul je n’y arrivais pas.

La descente est prudente au début, la maitrise d’un nouveau matériel ne s’improvise pas, mais surtout je crains la survenue de nouvelles et subites crampes. Très vite tout rentre dans l’ordre, la confiance revient mais surtout le plaisir de dévaler un espace immense et vierge de toute trace.

La neige qui recouvre la face Sud est très changeante, très dure et limite en glace au sommet, on y trouve curieusement d'immenses zones poudreuses, puis elle devient crouteuse et soudainement transformée dés 1600 m.

Malgré tout la traversée du «Sarrat du Bosquet» va se révéler exaltante. Quel bonheur que de faire sa trace entre les rochers et les arbustes à moitié recouvert de neige. De cheminer au hasard de l'enneigement. La colline a cet endroit là est une succession de terrasses en plateaux plus ou moins bien enneigées mais on trouve toujours un passage encore en neige qui nous permet de descendre d'un plateau à un autre.

La fin est plus pénible, la pente devient plus faible et la neige plus molle, on s'enfonce alors dans un bois mal entretenu avec des arbres un peu partout, certains sont à moitié couchés et nous barrent la route. Il nous faut pousser sur les bâtons pour avancer et parfois même enjamber une clôture.

Enfin, à mon grand étonnement compte tenu du parcours scabreux que l'on vient d'effectuer, on retrouve le chemin du départ avec au fond la voiture qui nous attends bien sagement.

Super journée, rare journée, et une trace insolite que je ne referai sans doute plus jamais de ma vie.

RV